Je tiens à dire ici combien les
différentes équipes qui m'ont prise en charge à l'hôpital du
Scorff ont été formidables.
Alors que je pleurais sur mon
allaitement disparu, toujours aux urgences, deux infirmiers sont
venus à tour de rôle me consoler – d'autant plus touchant que
c'étaient des hommes et qu'on ne s'attend pas de leur part à autant
d'empathie sur ce sujet particulier.
Lorsque j'ai demandé, ce
soir-là, de parler à une sage-femme afin qu'on m'explique comment
faire cesser les montées de lait, on m'a demandé d'attendre le
lendemain...
L'infirmière est revenue l'après-midi suivant avec
le sourire aux lèvres : la sage femme avait voulu se
renseigner, et grâce à elle, mon allaitement était sauvé !
Il suffisait de changer de traitement pour moi, et de continuer à
donner de la vitamine K à ma fille.
Toutes prenaient le temps
de venir discuter avec moi, même en pleine nuit. Lorsque je pleurais
le manque de mon mari et de ma petite Loutre, aussitôt une ou deux
infirmières ou aides-soignantes accouraient pour me tenir la main,
me caresser l'épaule, me dire comme j'étais courageuse de supporter
toutes les misères que j'endurais. Chacune s'extasiait sur la
frimousse photographiée de ma fille, et se précipitaient toutes
affaires cessantes pour la voir en vrai lorsque MrAmour arrivait,
triomphant, poussette en main.
Étonnamment, je garderais un
bon souvenir de cette hospitalisation. Je ne pensais pas recevoir
tant de bienveillance.
Deux semaines après mon retour à la
maison, je fais de nouveau un malaise. La douleur est tellement
similaire que je me prends à paniquer. Mais cette fois, c'est un
calcul biliaire qui menace ma santé.
L'opération est simple et
se déroule en deux temps : le mercredi, je suis opérée par
coelioscopie afin d'ôter la vésicule biliaire – dont on me dira
plus tard qu'elle était remplie de calculs gros comme des grains de
poivre — et le vendredi c'est le calcul qui me faisait souffrir qui
est retiré. Oui, sauf qu'en fait, en cours d'intervention on se rend
compte que le calcul est parti tout seul comme un grand...
En
théorie, ces opérations simples me permettaient de sortir dès le
samedi : mais pour pouvoir m'opérer, les médecins ont arrêté
mon traitement anticoagulant, et pour que je puisse sortir sans
risque de refaire une embolie, il faut remettre mon sang à niveau !
Tant que les résultats ne sont pas stabilisés, je dois rester dans
cette petite chambre, à m'accrocher au tire-lait — car il est hors
de question que mes efforts précédents soient réduits à néant –
et à pleurer de nouveau mon absence auprès de mes deux
amours.
C'est simple, en un peu plus d'une semaine
d'hospitalisation, j'ai perdu huit kilos, dont la moitié était de
larmes. Mon moral avait rarement été aussi bas.
Encore une
fois, les équipes ont été au top. De nouveau j'étais consolée,
rassurée, etc. Cela dit, ce sera là un moins bon souvenir. En
effet, on m'avait bien dit que je pourrais sortir le samedi, mais ce
ne fut pas le cas. Tous les jours on me disait : demain sans
doute, et tous les lendemains on repoussait l'échéance. Une torture
mentale pour une jeune maman. Tous étaient désolés. Une infirmière
a même tenté de me faire rentrer au service maternité pour que ma
fille et moi puissions être réunies, mais le service était
plein.
J'ai fini par sortir le mardi en début d'après-midi.
Épuisée, mais avec un grand sourire et des bouffées de bonheur
plein le cœur en tenant la main de mon mari et en poussant ma fille
vers la sortie. En plus, il faisait beau, que demander de plus?
Cela fait plusieurs mois que ces
hospitalisations et ces soucis de santé ont eu lieu, et a priori il
n'en reste aucune séquelle. Mais depuis je reste dans un état de
stress et d'angoisse presque permanent. Peur de la mort, de cette
douleur et qui ne prévient pas.
Depuis, j'ai perdu confiance
dans mon corps ; moi qui pendant les 20 jours de paix qui ont
suivi la naissance de ma fille, me suis sentie plus forte que je ne
l'avais jamais été, qui avais mesuré le pouvoir et les
extraordinaires capacités de mon corps, voilà qu'il me lâchait
violemment...
Petit à petit, je m'efforce de le
réapprivoiser, de ne pas rester paralysée par la peur. Le chemin
sera encore long, mais je finirai bien par y arriver.
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